Bravoart

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ATELIER - 24 février 2022 par Michel V. CHEFF

Catégorie: Démarche Artistique  /  Créé(e): 2022/02/24 14:43:16

Après plus de 35 ans de carrière, au sein des musées canadiens, je suis retourné en atelier et repris ma pratique en dessin et peinture, pratique amorcée dans les années 70. J’ai exposé en solo à la Galerie Jean-Claude Bergeron (GJCB), Ottawa, en 2017 et en 2020. Je participe à des expositions de groupes ainsi qu’à des foires comme PAPIER MONTRÉAL et ART TORONTO. Un nouveau solo est prévu à l’automne 2022 à la GJCB. 

Mes œuvres sont issues d’une réflexion et de recherches sur le papier et la toile comme espaces fondamentaux du dessin et de la peinture, et sur la couleur comme matériau premier. Le geste de dessiner et de peindre, tant immanent, intellectuel et spontané que somatique, physique et expressif, dicte le début, le milieu et la fin de chaque tableau.  Les écrits de Gilles Deleuze, sur « la peinture avant de peindre » où il explique que l’œuvre peinte existe dans la toile avant même l’acte de peindre, et ceux de Richard Shusterman sur le rôle du corps dans le geste de création, comme moteur et manifestation de l’expérience esthétique, me guident depuis plusieurs années. Support, matériaux, geste et hasard me mènent à la découverte en peinture.  

À l’époque de mes études en beaux-arts et en histoire de l’art, dans les années 70 et 80, je me suis intéressé à la peinture abstraite française et québécoise des années 50 et 60, et au post-expressionnisme américain des mêmes années.  La force intérieure, le sens de l’expérimentation et la liberté créatrice des peintres de l’époque m’ont particulièrement fasciné. Pour ne nommer que ceux-là, les De Staël, Bazaine, et Soulages en France, les Ferron, Gagnon et Simonin au Québec, et enfin, les Mitchell, Hartigan, Rothko et Twombly aux États-Unis, me fascinent encore et influencent ma recherche et ma production.

Je puise aussi mon inspiration de la nature au bord du Lac de la Marche, dans la Vallée-de-la-Gatineau. C’est là où je dessine comme je peins, et peins comme je dessine.  Je cherche la ligne, la couleur, la lumière, la texture et la matière des arbres, des sous-bois, des eaux et des ciels qui m’entourent. Mon geste témoigne de la dynamique intrinsèque à la matière, à la technique, et au support. Mon travail est tachiste, coloriste, expressionniste, abstrait et gestuel. C’est en soi une forme d’écriture. 

J’utilise des pigments en poudre.  Ce sont des terres colorantes venues de l’Italie, de la France, de la Turquie et d’ailleurs.  Elles sont diluées dans l’eau du Lac de la Marche, mélangées à des liants mats ou brillants, à des vernis et des glacis, à des gels d’épaisseur variables et à des textures.

La couleur pénètre la toile gorgée d’eau et se répand, au hasard. Elle est ensuite guidée par le geste de peindre, celui de la spatule, du pinceau, du chiffon ou de la brosse. Le temps de séchage fixe la couleur et permet de concevoir le prochain geste, le prochain stade du travail. Les couleurs, telles la terre verte ancienne, le vert Brentonico, celui de Nicosie, le turquoise d’Istanbul, l’ocre jaune clair, le jaune titan, le bleu de Delft et le bleu ciel sont appliqués par couches superposées et juxtaposées. Le blanc de Meudon et le blanc Titane viennent appuyer la couleur et faire jaillir la lumière.

L’intuition et le hasard agissent. Ils sont dirigés et manipulés. Le tableau s’articule et prend forme. Il en résulte des images abstraites, inédites. Un style pictural s’en dégage.  Le temps joue un rôle en déterminant le début, le milieu et la fin d’une œuvre, réalisée sur deux, trois ou plusieurs jours. C’est en quelque sorte, le journal de l’atelier, tel un « emploi du temps de l’œuvre d’art » ! L’œuvre existe alors dans la vie.

Michel V. Cheff, février 2022

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